Courir pieds nus (ou presque) : quels seraient les avantages de la course minimaliste ?

Manon
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18 min de lecture
Sommaire
Biomécanique de la course pieds nus
Les avantages de la course pieds nus
➡️ Réduction du coût énergétique
➡️ Réduction de l’amplitude de la foulée et augmentation de sa fréquence
➡️ Diminution du temps d’appui au sol
➡️ Favorise la foulée médio-pied et donc la puissance des appuis
➡️ Optimisation de la technique de course
➡️ Retrouver la sensation du pied nu : amélioration de la proprioception
➡️ Musculature des pieds et des chevilles renforcée
➡️ Absence des blessures causées par les chaussures
Les inconvénients de la course pieds nus
➡️ Manque d’adaptation progressive = risque de fracture de stress et/ou de blessure accrue
➡️ Qui dit course pieds nus dit forcément moins d’amortissement sur une surface dure
Quid des chaussures minimalistes ? Une bonne transition pour courir pieds nus ?
En pratique, comment intégrer la course pieds nus ?

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Bien avant l’invention des chaussures que l’on connaît aujourd’hui, l’Homme et ses ancêtres couraient déjà. Les plus anciens modèles de chaussures retrouvés sont des sandales en écorce d’armoise vieilles de 7 000 à 8 000 ans avant J.-C. découvertes dans l’Oregon, et des chaussures en cuir datées de 3 500 av. J.-C. trouvées en Arménie. Mais ces chaussures servaient simplement à protéger les pieds de celles et ceux qui les portaient, pas à optimiser leur foulée. Rien à voir avec nos chaussures modernes. Ainsi, pendant des millions d’années, nos ancêtres ont parcouru de longues distances quasiment pieds nus, développant une foulée et une biomécanique parfaitement adaptées à la course à pied. Plus récemment, certain(e)s athlètes ont démontré que courir sans chaussures n’était pas un frein à la performance. C’est notamment le cas de l’Éthiopien Abebe Bikila qui a remporté le marathon olympique de Rome, en 1960… pieds nus. Aujourd’hui, la tendance du barefoot running ou de la course minimaliste refait surface, popularisée notamment par le livre Born to Run de Christopher McDougall, qui raconte l’histoire des Tarahumaras, un peuple mexicain capable de courir des centaines de kilomètres sur des terrains accidentés, simplement chaussé de sandales rudimentaires. Dans cet article, nous explorons donc objectivement les avantages et les limites de la course pieds nus/minimaliste, pour comprendre si ce retour aux origines peut nous être bénéfique. 🦶
Biomécanique de la course pieds nus
Courir pieds nus, c’est revenir à une forme de mouvement plus instinctive et moins contrainte par la technologie des chaussures modernes. Sans amorti artificiel ni talon surélevé, le corps retrouve une mécanique de course naturelle, héritée de millions d’années d’évolution. Les muscles, tendons et fascias du pied travaillent alors comme un système élastique capable de stocker et restituer l’énergie à chaque foulée. L’arche plantaire, véritable ressort biologique, restitue à elle seule près de 17 % de l’énergie mécanique à chaque phase d’appui, améliorant ainsi le rendement et l’efficacité de la course.
Au fil des siècles, le port quotidien de chaussures a toutefois modifié la morphologie et le fonctionnement du pied humain, le rendant plus petit selon cette étude. Les chaussures de course modernes, apparues il y a à peine un demi-siècle, ont encore accentué ce changement en modifiant notre manière d’entrer en contact avec le sol. En effet, selon une autre étude scientifique, alors que nos ancêtres couraient naturellement sur l’avant du pied (forefoot strike, aussi dit FFS), près de 95 % des coureur(se)s actuel(le)s chaussé(e)s attaquent le sol avec le talon (rearfoot strike, aussi dit RFS). Cette différence n’est pas anodine :
En attaque talon (RFS), le pied atterrit loin devant le centre de gravité, générant un choc brutal transmis au genou et au tibia.
En attaque avant-pied (FFS), le pied se pose sous le corps, le genou est plus fléchi, et la cheville absorbe progressivement l’impact, réduisant les forces verticales et favorisant un mouvement fluide.
Courir pieds nus (ou en chaussures minimalistes) permet donc de réengager la chaîne musculaire et élastique du pied, d’améliorer l’amorti naturel du corps et de retrouver une foulée plus efficace et respectueuse de la biomécanique humaine.

Les avantages de la course pieds nus
En plus de ceux précédemment énumérés, courir pieds nus présente de très nombreux bienfaits. Voici les principaux d’entre eux.
➡️ Réduction du coût énergétique
Même les chaussures les plus légères représentent un poids supplémentaire à soulever et à déplacer à chaque foulée. En supprimant la masse des chaussures, le/la coureur(se) économise de l’énergie. De plus, l’absence d’amorti artificiel améliore le rendement mécanique naturel du pied, qui stocke et restitue l’énergie grâce à l’élasticité du tendon d’Achille et de l’arche plantaire.
➡️ Réduction de l’amplitude de la foulée et augmentation de sa fréquence
Sans semelle épaisse pour absorber les chocs, un(e) coureur(se) adopte spontanément une foulée plus courte et plus rapide. Cette cadence accrue (nombre de pas par minute) diminue le temps d’impact au sol et favorise une course plus fluide. En réduisant l’amplitude, on évite aussi de poser le pied trop loin devant le corps, un geste souvent associé à l’attaque talon et aux surcharges articulaires. Résultat : une foulée plus légère, plus rythmée et plus efficace.
➡️ Diminution du temps d’appui au sol
Comme nous l’avons dit précédemment, courir pieds nus entraîne un contact plus bref avec le sol, ce qui améliore la réactivité et la propulsion. En diminuant le temps d’appui, le corps profite d’un cycle d’étirement-raccourcissement plus efficace des muscles et tendons — un peu comme un ressort qui se comprime puis se relâche rapidement. Ce phénomène augmente la vélocité et participe à un meilleur rendement énergétique de la foulée.
➡️ Favorise la foulée médio-pied et donc la puissance des appuis
Pieds nus, l’attaque talon devient naturellement inconfortable. Essaye et tu verras : sans même t’en rendre compte, tu attaqueras le sol sur le médio-pied ou l’avant-pied pour amortir le choc. Ce type d’appui permet une meilleure utilisation de la cheville et du mollet, qui deviennent de véritables leviers de propulsion. Au final, on obtient une foulée plus dynamique, plus stable et souvent plus performante, avec une répartition plus équilibrée des forces sur le pied.
➡️ Optimisation de la technique de course
En supprimant les corrections artificielles imposées par la chaussure (stabilisation, amorti, drop, etc.), les coureur(se)s retrouvent une posture et une gestuelle plus naturelles. Le corps se redresse, le pied se place sous le centre de gravité, et la foulée devient plus souple. Cette auto-régulation favorise une technique de course plus économique et plus respectueuse de la biomécanique naturelle du corps.
➡️ Retrouver la sensation du pied nu : amélioration de la proprioception
Le contact direct du pied avec le sol stimule des milliers de récepteurs sensoriels situés dans la plante des pieds. Ces capteurs envoient au cerveau des informations précises sur la position, la pression et l’équilibre, renforçant la proprioception (la perception du corps dans l’espace). Courir pieds nus est donc un excellent entraînement pour améliorer sa coordination, sa stabilité et sa réactivité, autant d’éléments essentiels pour prévenir d’éventuels déséquilibres et chutes.
➡️ Musculature des pieds et des chevilles renforcée
Ces structures du pied, souvent “endormies” par des années de port de chaussures, se renforcent progressivement lorsqu’on court pieds nus. À long terme, cette adaptation conduit à un pied plus fort, plus stable et plus résistant face aux contraintes répétées de la course.
➡️ Absence des blessures causées par les chaussures
Enfin, courir pieds nus élimine un grand nombre de petits traumatismes directement liés au port de chaussures : ampoules, ongles noirs, hématomes, irritations, ou encore déformations comme l’hallux valgus. En laissant le pied évoluer librement, on réduit les frottements, les compressions et les points de pression.
Les inconvénients de la course pieds nus
Comme toutes les pratiques, la course pieds nus affiche aussi son lot de désagréments, desquels il est fort heureusement possible de se dépêtrer avec un peu de bon sens et quelques précautions.

➡️ Manque d’adaptation progressive = risque de fracture de stress et/ou de blessure accrue
Tout est une histoire de progressivité. Et cela tombe bien, car chez Campus, c’est l’un de nos leitmotivs. Ainsi, pour observer tous les bénéfices de la course pieds nus précédemment cités, il convient de passer progressivement d’une pratique de la course à pied avec chaussures à une pratique sans. Logique, non ? De la même manière qu’il ne te viendra sûrement pas à l’idée de débuter la course à pied en courant dix kilomètres d’affilée, n’essaye pas de courir dix kilomètres sans chaussures alors que tu en as portées toute ta vie. Courir sans chaussures, c’est une pratique à part entière. Et que tu sois coureur(se) depuis quinze ans ou depuis cinq minutes, cela ne change rien : dans tous les cas, tu pars de zéro dans ce domaine-là.
💡 C’est aussi pour cette raison que nous te recommandons de consulter un(e) professionnel(le) de santé sensibilisé(e) à la pratique de la course à pied (et pourquoi pas même au barefoot running) avant de te lancer.
➡️ Qui dit course pieds nus dit forcément moins d’amortissement sur une surface dure
L’amorti (ou plutôt, l’absence de l’amorti que procure une paire de chaussures) est un paramètre à considérer si tu souhaites courir pieds nus en toute conscience des éventuels “dangers” auxquels tu t’exposes. Eh oui, on ne s’en rend pas forcément compte lorsqu’on court avec des chaussures, mais le sol est jonché d’obstacles pour la peau fine et sensible de nos pieds qui ont toujours été bien protégés par une paire de chaussures. Débris de verre, échardes, cailloux, aspérité du sol, froid et chaleur sont autant de pièges avec lesquels il faut apprendre à composer. Mais ne t’inquiète pas, au fil de tes sorties running pieds nus, (en plus d’apprendre à redoubler de vigilance) des callosités (la fameuse “corne”) vont se former autour de tes pieds pour les aider à devenir plus résistants. Tes coussinets graisseux vont, eux aussi, se renforcer. Tu penses que l’on exagère ? Vois plutôt : tu ne songerais pas à emmener un jeune chiot courir dix kilomètres avec ses coussinets tout doux et tout neufs, pas vrai ? Eh bien, pour les tiens, c’est pareil. Enfin, nous te recommandons fortement de vérifier que le rappel de ton vaccin contre le tétanos est bien à jour pour éviter tout risque d’infection via d’éventuelles coupures.
Quid des chaussures minimalistes ? Une bonne transition pour courir pieds nus ?
Les chaussures minimalistes sont pensées pour que tu aies la sensation de courir pieds nus ; les pieds sont libres de leurs mouvements et leur stabilité n’est pas contrôlée. Ces chaussures ne sont qu’une protection contre les éléments extérieurs et n’offrent :
pas de maintien,
pas de soutien de la voûte plantaire,
pas de semelles rembourrées et amortissantes.
En fait, il s’agit plutôt d’une semelle de protection dans laquelle on vient glisser son pied. Par ailleurs, le fait que le drop soit nul permet vraiment de reproduire la foulée pieds nus.
En somme, les chaussures minimalistes font office d’excellente transition vers la course pieds nus. Plus encore, nombreux(ses) sont celles et ceux courant avec des chaussures minimalistes à considérer qu'ils courent pieds nus, et ils/elles n’ont pas tort. Si on y réfléchit bien, c’est comme porter une paire de gants pour réchauffer ses mains, ou une paire de lunettes de soleil pour protéger ses yeux. 🤷🏽♀️
En pratique, comment intégrer la course pieds nus ?
Pour commencer, chausse des chaussures minimalistes pour familiariser ton corps (et notamment tes pieds et tes mollets) à la course sans drop et au plus près du sol. Introduis ensuite progressivement la course pieds nus : pas plus de cinq minutes à la fin de ta séance, puis augmente petit à petit la durée de ta course pieds nus. À noter que Blaire Dubois, le fondateur de La Clinique du Coureur, estime qu’il faut quatre ans à un(e) athlète qui court pieds nus pour retrouver le niveau de performance qu’il/elle avait lorsqu’il/elle courait avec des chaussures : une adaptation au long cours qui vaut la peine qu'on lui accorde son temps si la course pieds nus nous fait de l'œil.

Courir pieds nus ou en chaussures minimalistes signe une véritable connexion à notre biomécanique naturelle. Cette pratique permet de redécouvrir la foulée médio-pied, caractérisée par une fréquence de pas plus élevée et une amplitude réduite, et qui favorise des appuis plus dynamiques et un meilleur amortissement naturel du corps. Elle concourt à développer une proprioception plus fine grâce à un retour sensoriel direct avec la surface du sol. Cependant, adopter cette technique de course ne s’improvise pas : la transition vers la course pieds nus demande une adaptation progressive… Et d’ailleurs, tout bien réfléchi, rien ne saurait mieux qualifier la course pieds nus que cette notion de progressivité ; car à travers ce retour au naturel, ce que l’on souhaite, au fond, c’est prendre son temps, tout simplement.

Manon
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